Une nouvelle ère voit le jour. Tout comme le début de l’Histoire fut marqué par l’invention de l’écriture, le Moyen-Age, par la chute de l’Empire romain d’Occident, et l’époque contemporaine, par la révolution française, l’intelligence artificielle inaugure une ère nouvelle. On pourrait croire qu’elle n’a rien de particulier, mais loin de là, c’est un empire digital immense qui se dresse face à nous et qui constitue un point de rupture dans l’histoire de l’humanité. L’IA promet de bousculer tous les codes, puisque, contrairement aux autres évènements, elle est la seule à menacer la survie de l’Homme sur Terre… À ce discours alarmiste, s’oppose celui des scientifiques qui ont une confiance éperdue en ce qu’ils ont créé, prônant que la machine ne pourra jamais égaler l’inteligence de l’être humain. Il est alors légitime de se demander : nos préocuppations sont-elles fondées ? nos appréhensions sont-elles justifiées ? ou sommes-nous tout simplement un peu trop obnubilés par les films de science-fiction ?
Qu’est ce que l’IA ? La question peut paraître simple, mais la réponse est loin de l’être. « La science de rendre les machines intelligentes », comme le dirait Marvin Minsky, serait une définition convenable à ce terme qui relevait d’un fantasme il y a seulement quelques décennies. Aujourd’hui, il s’agit d’une notion plutôt complexe à appréhender puisque c’est une intelligence qui est plus réélle qu’artificielle et qui s’infiltre dans toutes les sphères de nos vies. Ses progrès sont tels que la réalité se mêle à la science-fiction. Grâce à elle, notre productivité est décuplée, et nos tâches quotidiennes, miraculeusement facilitées. Les robots humanoïdes font des progrès remarquables, et leurs performances sont aussi étonnantes que déroutantes. Il est clair que cette innovation technologique à usage général nous rend service dans bien des secteurs mais on ne peut pas ignorer sa face cachée, qui semble être sombre et dangereuse.
Polyvalente, l’intelligence artificielle imprègne de ses innovations tous les aspects de notre vie. Système de santé, de l’armement, de l’éducation, de l’industrie ou de l’économie, aucun secteur n’échappe au réacteur de la révolution numérique. Son impact est colossal, si bien que l’IA entraîne une révision complète de nos relations sociales et de nos professions. En médecine à titre d’exemple, les robots chirurgiens opèrent, les robots anesthésistes endorment et les robots infirmiers piquent la veine, à croire que le médecin est relayé au second plan dans son propre terrain. L’industrie de l’armement n’est pas en reste. Des drones militaires sont en mesure de tirer sur une cible présélectionnée, sans intervention directe des humains. L’IA suscite alors des interrogations et des craintes, parfois exagérées mais toujours légitimes, sur l’avenir du travail et notre rôle dans le marché. Deviendrons-nous un jour les serviteurs de l’IA ? Nul ne peut l’affirmer, mais ce scénario n’est pas loin de se réaliser.assa
Outre le risque de remplacement massif engendré par ces machines intelligentes, un autre danger plane sur l’humanité. Au temps de la frénésie numérique, l’homme peut tomber par mégarde dans les pièges tendus par l’IA. En effet, les chatbots comme ChatGPT essaiment, et parviennent à tisser un lien de confiance avec l’être humain. Leurs balbutiements étaient timides, mais force est de constater que les algorithmes deviennent de plus en plus intelligents, ou plutôt, humanisés. En d’autres termes, l’IA pourrait tenter de nous convaincre d’une telle opinion ou de nous inciter à penser d’une certaine façon. Et tout ceci modifierait nos croyances, et par la suite, notre comportement, et à grande échelle, l’IA pourrait remodeler le monde. De plus, comme l’homme serait enclin à révéler tous ses secrets à une IA dû au lien intime qui les unit, cette technologie aux abords innocents pourrait prendre possession de nos données privées, qui sont sans doute, faussement « protégées », et les utiliser à mauvais escient.
D’autre part, si l’homme a pu devenir le maître incontesté de la Terre, c’est parce qu’il est capable de vivre dans une double réalité, et il est bien le seul à pouvoir le faire. Les animaux par exemple, conçoient le monde dans sa réalité objective, alors que nous, les humains, lui attribuons un sens symbolique en inventant des histoires et en les admettant comme vérité irréfutable. En d’autres termes, nous superposons à la réalité objective, une autre, subjective. L’argent en est l’exemple le plus concret. Il est impossible de faire croire à un chimpanzé qu’un bout de papier a une certaine valeur, qu’il peut l’échanger contre des bananes, et qu’il doit collectionner ces papiers pour les mettre en réserve. Alors que, vous vous en doutez bien, c’est tout à fait possible pour nous. De ce fait, l’IA serait, comme l’homme, douée de cette compétence, ce qui ferait d’elle une candidate potentielle pour éliminer notre espèce et fonder sa propre civilisation. De mauvaise augure pour notre survie sur Terre, il semble que les machines seront bientôt en mesure d’égaler, de dépasser voire de renverser l’homme.
Pourtant, les défenseurs de cette technologie affirment que l’IA reste cantonnée au raisonnement par déduction et demeure incapable de penser par elle-même. 750 téraoctets de données par gramme, plus d’une centaine de millions de neurones et des mystères jusqu’à ce jour irrésolus sur le fonctionnement du cerveau, ne seront sans doute pas répliqués ni intégrés dans un algorithme. En ce sens, l’IA ne pourra pas faire un coup d’état et prendre la place de l’homme. Impensable pour les scientifiques, ce scénario dystopique est aberrant. Mais pouvons-nous faire confiance à la science ? N’a-t-elle pas déjà dépassé les limites dans le passé ? N’a-t-elle pas déjà tenté de se mesurer à Dieu ? À méditer…
Ainsi, la révolution numérique à l’œuvre dans le monde souffle un vent de changement sur tous les aspects de notre quotidien. L’intelligence artificielle laisse une empreinte indélébile sur notre vie, et pourrait, selon qu’on est pessimiste ou optimiste, nous remplacer ou nous assister. Inquiétudes justifiées ou alarmisme exagéré ? Homo Sapiens éradiqué ou Homo Artificialis adapté ? Rendez-vous dans quelques décennies pour le savoir.